Chère inconnue, chère amie, chère sœur de cœur,
Je t’écris aujourd’hui, car je sais que tu as mal comme ça ne se peut pas. Peut-être que les autres ne le voient pas ou tout simplement plus…
Avant toute chose, je voulais te dire que je t’aime. Oui, oui, à l’aveugle, comme ça. Parce que de l’amour, tu n’en recevras jamais assez pour combler cette perte, ce trou béant que tu portes à l’intérieur de toi depuis le jour où tu as perdu ton bébé. Oui, c’était bien ton bébé, même s’il venait tout juste de sortir de toi, même s’il n’a pas eu le temps de prendre une première inspiration de vie, même s’il ne t’a jamais appelée maman; c’était ton enfant et personne ne pourra jamais t’enlever ça.
Peu importe le nombre de trésors que tu as eus avant ou que tu auras par la suite, ce petit être sera à tout jamais ton premier, ton deuxième ou même ton petit dernier… Personne ne pourra jamais le remplacer.
Même si ça fait longtemps que ton petit ange est retourné « dans ses souliers », un peu comme dans la chanson d’Ariane Moffatt, toi, tu y penses encore. Probablement tous les jours. Parce que tu n’as rien décidé; tu n’as pas eu le choix et ça, ça te déchire. Quand tu en parles autour de toi, tu l’appelles Mia-Rose, Nicolas, Loucas, Camille… Tu en parles comme s’il s’agissait d’une personne qui avait vraiment fait partie de ta vie et je te comprends.
Quand tu regardes tes enfants plein de vie qui grouillent partout, tu le vois lui, avec eux, et tu te demandes bien s’il aurait eu les cheveux noirs de son frère ou les yeux en amande de sa sœur… Tu te demandes s’il les aurait mangées, lui, ses bananes, au lieu de les recracher dans son assiette avant d’éclater de rire devant tes gros yeux. Tu t’imagines des instants bénis ou tu pourrais enfin le tenir dans tes bras, son petit corps chaud contre le tien. Juste quelques secondes, le temps qu’il reparte jouer et qu’il recommence à grimper sur le divan et à mettre le salon sens dessus-dessous…
Cet enfant en devenir a grossi dans ton ventre et tu lui as parlé, tu l’as peut-être même senti bouger? Tu lui chantais parfois des chansons comme quand tu étais petite et tu lui faisais écouter des pièces de musique classique en coiffant le bout de ta bedaine d’un casque d’écoute… Et ça faisait bien rire ton chum… Ça vous faisait rire tous les deux. Vous avez été heureux ensemble. Parce que votre histoire, elle avait bel et bien commencé.
Chaque fois que la date fatidique approche, la tristesse que tu maîtrises si bien d’habitude pour mieux avancer, pour continuer à fonctionner, bien, tu la sens remonter et t’inonder le cœur. Ce sont comme des vagues de larmes, des gorgées d’eau salée qui se fracassent contre toi et tu les avales, tu les respires, tu n’y peux rien : elles sont trop fortes. Tu n’es plus capable de te soigner, le temps de cette journée qui goûte le noir. Tu n’es pas capable d’oublier. Tu n’es pas capable de l’oublier, lui.
Tes parents, ta famille, tes amis, eux, sont parfois mal à l’aise de te voir comme ça. Ils ne savent pas quoi faire, ils baissent les yeux quand tu en parles. Mais toi, tu as tellement besoin de le faire revivre de cette façon!
Quand tu prononces son nom, c’est un peu comme s’il était encore avec toi. Quand tu pleures ta douleur, c’est une façon de le garder en vie : tes larmes, ta peine, c’est tout ce qui te reste de lui. Si tu arrêtais d’en avoir, c’est un peu comme si tu l’oubliais, comme si tu le laissais partir…
Pour de bon…
Pour en savoir davantage sur les façons de surmonter un deuil périnatal, nous vous invitons à lire la réponse de Naissance Renaissance Estrie juste ici…
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J’ai une amie qui a vécu ce deuil il y a pus de trente ans. Atteinte de diabète de grossesse, elle a été obligée d’accoucher d’une petite fille à six mois de grossesse, la sachant décédée depuis un mois dans son ventre, et trop tard pour un avortement thérapeutique. Cela a pris des années avant que son deuil ne s’adoucisse. Avec le temps, en voyant grandir ses fils, et en devenant grand-maman de sept … petites-filles ! oui oui, mon amie a réussi à la laisser partir, sans toutefois la reléguer dans l’oubli oh! non. La douceur du deuil a remplacé la douleur et la vie lui est plus douce à présent.
La perte d’un enfant, que ce soit après plusieurs années de vie ou que quelques mois de grossesse, c’est perdre une partie de soi. C’ est dire adieu à des rêves et à des espoirs. Tous les deuils font mal mais certains sont plus faciles à accepter, à comprendre. La perte d’un enfant, c’est contre naturel, ça révolte parce qu’un enfant, c’est supposé survivre à ses parents. Même à 6 semaines de grossesse, il prend déjà tellement de place dans le coeur d’une maman qu’il ne pourra jamais être oublié.
Quand en plus, la famille compte déjà d’autres enfants, il s’ajoute à la peine des parents l’importance d’accompagner ceux-ci dans leur deuil de leur frère ou de leur soeur. Je partage ce texte que j’ai écris la semaine dernière: http://odreyal.com/enfants-confrontes-deuil/
Toutes mes pensées aux mamans qui vivent cette peine.
Merci pour ce beau partage, Audrey! C’est grandement apprécié!