Vous vous souvenez, je suis revenue de ma virée du 12 août avec deux (plusieurs) livres-jeunesse québécois dont j’avais vraiment envie de vous parler ici? Peut-être que vous allez rouler des yeux en vous disant : « Pfffff… Je les connais depuis longtemps, ces auteurs-là! » À cela, je vous répondrais : « Tant mieux! », parce qu’on va pouvoir en jaser dans les commentaires après!
Mais pour ceux et celles qui n’ont jamais le temps de magasiner leurs auteurs-jeunesse (ce qui se pourrait très bien, avec des enfants et un paquet d’autres trucs à faire sur votre to do list), bien, en voici deux pour lesquels je craque littéralement! J’ai moi-même laissé Costco décider pour moi quand fillette n’était qu’une petite poussière de vie (et merci, Costco, tu m’as sauvé la vie #jevousdislesvraiesaffaires), mais là, j’ai eu envie de m’y mettre et aussi, de consulter nos experts en livres pour cocos d’amour à ma librairie de quartier!
Elise Gravel et Je veux un monstre
Quand on parle d’albums-jeunesse, on n’y échappe pas : on SAIT que les illustrations sont aussi importantes que l’histoire! Alors, si j’aime autant Elise Gravel, c’est d’abord pour ses illustrations qui parlent d’elles-mêmes. Elle a un style BD avec des bulles de dialogues vraiment rigolotes! Ses personnages sont attachants parce que parfois étranges, repoussants, voire monstrueux, mais atrocement gentils et beaux dans leur laideur à cause de ça!
L’auteur a aussi ce don merveilleux de se mettre dans la peau des enfants, de recréer leur univers, leurs perceptions et leur façon de voir le monde. C’est sans aucun doutes parce qu’elle a elle-même su garder son cœur d’enfant et qu’elle est maman de surcroit! J’ai parfois l’impression qu’elle a une sorte de magie en elle pour deviner ce qui leur plait le plus, ce qui capte leur attention et ce qu’ils considèrent le plus important dans la vie. J’ai envie de lui dire merci pour ça… D’ailleurs, Elise Gravel est assez présente sur les réseaux sociaux et prend le temps de répondre à ses fans assez régulièrement. Elle est aussi impliquée dans plusieurs causes qui lui tiennent à cœur et fait des levées de fonds. Par exemple, avec les profits ramassés par la vente de ses illustrations sur le site Sur Ton Mur, elle est venue en aide aux jeunes en difficulté et sans abri à travers le Québec (les Auberges du Coeur). Généreuse, elle a gentiment offert quelques exemplaires de ses livres signés, par-ci, par-là, dans les bibliothèques de rue de son quartier…
On aime donc la personne derrière le livre; on voudrait bien être son amie!
Dans « Je veux un monstre », la petite Winnie désire s’acheter cette bébête à poils et essaie de convaincre son père en lui disant qu’elle connaît tout sur le sujet grâce à ses lectures. Elle lui promet qu’elle saura bien s’en occuper!
Par déformation professionnelle, j’aime bien aborder les livres-jeunesse par thème! Ainsi, je pense que « Je veux un monstre » pourrait servir d’outil intéressant pour parler du désir d’avoir un petit animal domestique à la maison. C’est bien beau de les trouver mignons, mais il faut s’en occuper! On peut ainsi faire le parallèle avec le monstre et l’animal à adopter et parler du sens des responsabilités, de ce que ça implique, avoir un animal à la maison…
Aussi, pourquoi ne pas utiliser « Je veux un Monstre » pour démystifier certaines peurs chez les enfants! Fille chérie est à fond dans les peurs avant l’heure du coucher ces temps-ci et le fait de voir plein de petits monstres hyper sympathiques dans ce livre lui permet de s’approprier autrement ce genre de figures effrayantes et qui risquent d’être trop présentes dans son imaginaire à l’heure du dodo (les sorcières, les fantômes, les monstres, le noir… On est en plein dedans!).
Elise Garvel semble d’ailleurs avoir fait des petites bestioles et autres-créatures-qu’on-n’aime-pas, un de ses sujets chouchous. On peut donc apprendre à apprécier ces petites bébêtes à l’aspect repoussant et les apprivoiser en apprenant un tas de trucs à leur sujet! Le fait de connaître permet donc de passer par-dessus la peur et de s’en approprier l’objet.
Difficile de passer à côté de l’aspect visuel fort de cet album! Je ne sais pas pour vous, mais moi, J’ADORE quand les illustrations regorgent de petits détails! J’aime qu’on puisse y plonger le nez pendant de longues minutes afin de tout lire ou de tout repérer ce qui nous a échappé la première fois. On tombe tellement sur de belles surprises, on découvre la valeur ajoutée de la page, on en goûte les nuances! Dans « Je veux un monstre », le texte est aussi une illustration!
Certains mots sont plus gros, entourés de bulles de style BD; on en a choisi judicieusement la forme et la couleur pour créer plus d’impact. Certaines pages sont séparées en cases, comme dans une vraie BD, alors que d’autres arborent des illustrations qui prennent l’espace entier… Cela rend la lecture dynamique et vraiment intéressante. Je pense sincèrement que ce genre de livres aura raison de tous les enfants, même de ceux qui n’aiment pas trop lire ou qui présentent des difficultés!
On aime aussi les deux dernières pages qui offrent à l’enfant la possibilité de dessiner lui-même son monstre, de réfléchir à son apparence, sa nourriture, ses activités… On propose plusieurs mots de vocabulaire qui sortent un peu du répertoire habituel des enfants afin d’aller plus loin et d’enrichir leur langue avec des mots nouveaux. On les initie à la clarté, la précision, l’importance du mot juste…
Quant à l’âge recommandé pour cet album, je fais partie de celles qui aiment bien y aller à l’instinct! On connaît bien notre enfant, on connaît son niveau de maturité et de développement et on est à même de savoir ce qu’il est en mesure d’apprécier et ce qui l’aidera à évoluer. Ma puce à moi aime beaucoup ce livre, mais je sais qu’il fera des heureux chez les enfants d’âge primaire, pour des raisons différentes!
Catherine Lepage et Pierre Lapointe et Le tragique destin de Pépito
Pourquoi cet album bizarre, un peu sombre, aux illustrations étranges? Eh bien, je ne sais pas trop pourquoi, mais j’aime beaucoup les univers de ce genre à la Tim Burton… J’aime me faire surprendre, que l’on renverse certains concepts, qu’on nous présente la réalité de manière poétique, à l’aide de symboles.
Pépito, c’est l’enfant différent que peu arrivent à comprendre. Il est à mi-chemin entre la réalité et l’imaginaire, les deux univers se chevauchent pour nous livrer un message plus subtil, plus puissant. Il est facile d’aborder le thème de l’intimidation et de faire parler l’enfant à ce sujet. Pépito est gros, ne fait pas de sport et est solitaire, ce qui lui emmène des ennuis…
Il est clair que je n’ai pas lu ce livre à ma puce, mais je me verrais bien en jaser avec elle lorsqu’elle aura 11-12 ans, peut-être un peu avant, ça dépend… Il faut être à l’aise avec le fait que le personnage meure (disparaisse) à la fin, mais ça dépend de nos valeurs et de notre degré de confort avec ce sujet-là…
J’aime beaucoup la correspondance entre Pépito et sa cousine; les lettres présentent une écriture cursive soignée; on dirait de véritables lettres d’enfant écrites à la main au crayon-mine! On plonge dans l’enfance, dans ce qu’elle a de beau, mais aussi, de moins beau à nous offrir. On apprend que les autres peuvent blesser quand ils sont jaloux, quand ils ne nous comprennent pas. On apprend que les différences sont source de méchanceté, mais aussi de richesse et qu’elles réservent de magnifiques secrets; Pépito donne des bonbons à une petite fille qu’il trouve gentille, qui semble le comprendre et l’apprécier. On y apprend aussi à qui offrir son amitié, sa confiance. Bref, c’est un livre sur les relations humaines, sur la vie… Sur les drames qui surviendront inévitablement dans notre existence…
Bravo Pierre Lapointe et Catherine Lepage, d’avoir osé sortir des sentiers battus et d’avoir exploré ce type de sujets lourds et parfois même tabous quand il est question de littérature-jeunesse!
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