Prendre le temps…

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Oui, comme maman à la maison, j’ai le temps de prendre le temps. Ce n’est pas mieux ou pire que les autres, mais c’est tout simplement mon choix. Un choix qui, ma foi, m’apporte beaucoup de bonheur, je dois l’avouer.

Au début, avec tous les soins dont princesse avait besoin, je me sentais parfois, disons, prise? Entre 4 murs? Moi qui adore sortir par pur plaisir de « sortir ». Dans mon livre à moi, aller faire un truc ailleurs correspond à la définition de « faire quelque chose ».

Maintenant qu’elle a grandi, qu’elle court partout, qu’on jase ensembles et qu’on peut « sortir » plus souvent, j’apprécie encore plus de passer du temps avec elle. Il y a toutefois quelque chose en moi qui persiste à me dire que ce n’est pas ça, la vie. Que je devrais penser à retourner travailler rapidement. Parce que c’est ce que les femmes accomplies font. Il est clair que j’ai pensé à la chose plusieurs fois. Tous les jours, en fait.

Pourquoi? Bien, parce que j’aimais mon travail, j’aimais enseigner. Et aussi parce que je me dis que tout ce que j’ai mis des années à apprendre, à accomplir, ce serait bête de le perdre « à ne rien faire » à la maison. Je ne fais pas « rien », c’est sûr, mais je n’enseigne plus. Je ne prépare plus de cours. Je n’ai plus le nez dans ma grammaire à tous les 10 minutes. Peut-être, mais je fais autre chose…

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C’est fou à quel point on est allergique à ça, ne rien faire. De rémunérateur, je veux dire. On n’est pas vraiment formé pour ce style de vie. On angoisse. On a peur du jugement. On a peur d’être étiqueté rétrograde. Mais passé ça, on se rend compte qu’on a une chance en or de voir nos enfants grandir, de créer des moments magiques et uniques avec eux. De faire partie de leur vie en tissant un lien d’attachement solide de chez solide.

La temps passe tranquillement. En fait, on nous redonne le privilège de vivre au rythme des enfants. Le mouvement slow, ce n’est pas que pour les intellos… Et c’est chouette. Le stress est divisé de moitié, dans mon cas, du moins…

C’est parfois fascinant de voir à quel point les expériences de vie se recoupent sans crier gare. Je m’explique. Nous sommes en 2001. J’ai 22 ans. Je fais mon baccalauréat en éducation à l’U. de M. Un jour, je reçois une lettre de la faculté: on me donne une bourse de mobilité pour étudier 4 mois en France, à Montpellier. Paraît que j’ai un bon dossier. Paraît que j’ai bossé assez fort depuis toujours sur les bancs d’école et que quelqu’un s’en est rendu compte. J’accepte. Je pars, non sans me demander ce que je suis en train de faire là. Jamais traversé l’océan. Jamais partie aussi longtemps…

J’arrive à Montpellier. Je débarque du train. La ville est inondée de soleil. C’est l’Europe, le vieux continent version vacances. Le long de la ligne de tramway, il y a des palmiers. Et voilà que je m’aperçois que ces fameuses études ne nécessitent rien d’autre que ma présence en classe. Plus un travail de 30 pages à la fin et un oral. Une affaire de rien comparativement à ce que je suis habituée de produire en tellement moins de temps.

Pendant 4 mois, on m’a libéré d’un cadre. Un cadre qui me suivait depuis ma première rentrée scolaire: aller à l’école, produire des travaux, faire des examens, réussir son année, recommencer. Apprendre sans la pression des examens, je ne connaissais pas! Et j’ai appris, j’ai grandi, je suis devenue ce que je suis aujourd’hui à peu près à ce moment-là. J’en ai profité pour voyager, mon petit sac-à-dos rouge sur le dos: l’Espagne, le Portugal, l’Italie, la Belgique… Sans compter plusieurs régions de la France que j’ai décidé de m’approprier, moi qui ne connaissais à peu près rien de tout ça. Moi, la studieuse chronique. Moi, la petite fille de Valleyfield qui commençait à peine à connaître « la grande ville » et qui partageait son temps entre le pavillon Marie-Victorin, rue Édouard-Montpetit et le centre-ville dans une boutique de vêtements pour dames…

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Suite bientôt…

Pascale Clavel