Cette pièce magnifique pour les 6-12 ans, je l’attendais vraiment. Il faut dire que tout ce que touche Simon Boulerice de près ou de loin semble se transformer en magie…
Edgar Paillettes n’est pas un petit garçon comme les autres; son grand frère Henri, lui se déclare « normal », mais sans grande joie… Il faut dire que tout le monde n’a d’yeux que pour ce petit frère tellement attachant et atteint du trouble du spectre de l’autisme . En effet, Edgar se déguise tous les jours, fait preuve d’une rafraîchissante spontanéité et peut littéralement être qualifié de véritable poésie ambulante!
Nous sommes spectateurs de cette relation fraternelle qui nous est révélée un jour à la fois (ou une nuit à la fois, tout dépend des points de vue). Nous sommes témoins de la palpable jalousie qu’éprouve Henri pour Edgar… Il n’y a qu’à penser à l’atelier d’arts dramatiques où les deux frères se livrent à des performances fort différentes. Edgar est à l’aise comme un poisson dans l’eau alors qu’Henri-l’introverti ne sait pas trop où se mettre ni quoi dire…
Ce qui m’a plu, c’est que les jeunes spectateurs apprennent à apprivoiser la différence d’Edgar de manière positive: elle est vue comme un atout à travers les yeux de son grand frère qui l’envie…
J’ai aussi eu l’impression qu’on nous a amenés à expérimenter gentiment « le malaise » à petites doses. Celui qui s’empare de nous quand nous sommes face à cette différence qui nous fait peur, qui nous place en position d’inconfort sans qu’on s’explique trop pourquoi. Par exemple, le petit Edgar souhaite échapper sa pièce de 25 cents offerte par la fée des dents la nuit afin de pouvoir ramper par terre et regarder sous la splendide robe bouffante et scintillante du célèbre personnage. Ces interventions nocturnes de la part de cette fée des dents fort sympathique mettent d’ailleurs en lumière le regard différent que porte l’adulte bienveillant sur un enfant « un peu spécial » à qui l’on permet des comportements socialement discutables. Henri aimerait bien, lui aussi regarder sous les jupes des filles (comme bien des garçons), mais il sait bien que c’est répréhensible…
Il tente d’ailleurs le coup avec une élève de son école, Vicky, qui lui donne un solide coup de poing afin de le remettre à sa place. Mais ils se réconcilient rapidement, car Vicky apprécie beaucoup Henri pour ce qu’il est et Henri n’est pas non plus insensible aux charmes de cette fille costaude et dynamique dont l’exubérance détonne agréablement avec sa propre timidité. Les stéréotypes sont ainsi délicieusement renversés, de sorte que la différence est abordée de multiples façons. Vicky bat les garçons au tir au poignet, adore jouer à la « boxeuse »… Et, lorsqu’elle enfile un costume de princesse pour l’Halloween, Henri la complimente en déclarant qu’elle n’est pas une « princesse ordinaire ». 🙂
Ce jour de l’Halloween permet d’ailleurs à Henri de révéler « ses paillettes », sa flamboyance, car il peut enfin se déguiser en Spider Man, tout comme le fait si souvent Edgar. Cette fête lui procure enfin le contexte idéal pour sortir de sa coquille sans avoir trop peur du ridicule…
Autre point intéressant à soulever : l’ambivalence du grand frère par rapport au comportement saugrenu de son petit frère. Henri admire Edgar pour son aisance, mais en même temps, il est jaloux. Il lui arrive aussi d’être exaspéré par la (trop) grande présence d’Edgar. Comme tous les grands frères, il en vient parfois aux petits coups par en-dessous, au jeu de pouvoir exprimé tantôt verbalement, tantôt physiquement. Encore une fois, on expérimente le malaise, car toute la vulnérabilité d’Edgar nous touche encore plus dans le cadre de ces querelles. Mais la tendresse d’Henri pour son frère revient vite au galop quand cette lutte va trop loin. 😉 Il y aurait aussi tant à dire sur la place du vêtement dans cette pièce, au rôle qu’il joue quant à l’expression de l’identité, mais je vais vous laisser le loisir de le découvrir…
En terminant, chapeau pour les acteurs qui ont su se plonger dans la peau de personnages d’enfants merveilleusement bien réussis! Je ne peux non plus passer sous silence le naturel incroyable avec lequel le comédien Maxime Desjardins a su donner vie au petit Edgar « différent et flamboyant ».
Une pièce qui remue, mais de la bonne façon.
Infos utiles
Edgar Pailletttes est présenté à la Maison Théâtre du 20 au 31 mars 2019. Pour connaître les dates des représentations, c’est ici!
Une rencontre avec les artistes est prévue le dimanche 24 mars après la représentation de 15h00. Pour l’atelier parent-enfant, c’est le dimanche 31 mars que ça se passe (représentation de 15h00)!
Note : Merci à la Maison Théâtre pour l’invitation. Je ne présente que mes coups de cœur sur Un Autre Blogue de Maman, alors tout ce qui a été écrit précédemment est le fruit d’une réflexion sincère.
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